Histoire d'une oeuvre / "Oiseaux de nuit" - Edward Hopper (1942)
Huile sur toile, 84 x
Edward Hopper est considéré comme un des principaux représentants du courant naturaliste ou de la « scène américaine ».
Au début du XXème siècle, Edward Hopper fit plusieurs visites à Paris où il découvrit de nombreux artistes comme les maîtres néerlandais (Rembrandt par exemple et sa « Ronde de Nuit » qu’il appréciait tout particulièrement). Il choisira de ne pas suivre ses contemporains dans leurs expériences cubistes et préfèrera l’idéalisme de peintres réalistes comme Gustave Courbet ou Jean-François Millet. On note cette influence dés ses premières œuvres.
Son célèbre tableau « Oiseaux de nuit », lui, a été très influencé par deux autres peintres impressionnistes Edgar Degas (dont il était un grand admirateur) et Edouard Manet. Grâce à eux, il mit en œuvre la tension dramatique qu’on perçoit dans la distance entre les différents éléments du tableau. Cette distance laisse un espace mental au spectateur pour qu’il puisse y placer ses propres interprétations.
Entre 1913 et 1923, l’artiste travaille comme illustrateur de magazines. Il n’aime pas du tout ce travail. Cependant cela lui permet de perfectionner ses capacités de composition des éléments d’un tableau. Il apprend aussi à épurer ses traits.
« Oiseaux de nuit » est un tableau réaliste d’une grande sobriété. En dehors de la multitude discrète de détails dans le bar allumé, le reste ressemble à un vide apparent.
Le spectateur concentre naturellement son regard sur le « dîner » inspiré d’un restaurant de Greenwich Avenue à New-York. Les néons fluorescents constituent l’unique source de lumière du tableau. Ce bar est décalé sur la droite de l’œuvre, donnant ainsi à penser qu’il n’est pas au centre de l’intérêt de la peinture. Car le centre du tableau attire plutôt le regard vers la rue sombre, déserte, vide de mouvement, éteinte dans tous les sens du terme. Et si on considère que l’intérieur du bar représente la vie, alors celle-ci apparaît dans une profonde solitude. En dehors du barman qui regarde un des clients, les trois personnages ne se parlent pas, ne se regardent pas. Ils semblent absorbés et plongés dans leur pensée, comme si l’autre n’existait pas.
On retrouve ce type de personnages dans d’autres tableaux d’Edward Hopper, l’image d’une certaine Amérique où les gens sont étrangers l’un à l’autre, un monde moderne marqué par la solitude et l’isolement, par l’individualisme.
On qualifie souvent le travail d’Hopper de « cinématique » en raison du fort contraste entre la lumière et l’ombre qui rappelle l’atmosphère des films noirs de cette époque.
Le sociologue Richard Sinnett parle à ce sujet du « paradoxe de la solitude en pleine visibilité ». L’Amérique des années 30-40 vue par Hopper est emplie de gens qui se côtoient sans vraiment communiquer ensemble. Le travail d’Edward Hopper touche encore aujourd’hui, nous émeut parce qu’il dit en précurseur le monde du XXIème siècle où la communication par portable, écrans et messageries nous replonge dans l’isolement et le vide de chacun, pourtant côte à côte en pleine lumière. Cette Amérique des années 30-40 préfigure notre Occident d’aujourd’hui.
Les détails du tableau
La partie gauche du tableau représente la rue vide et les magasins fermés. On remarque quelques ombres dans les vitrines dont une caisse enregistreuse à peine éclairée. De même, on devine des formes aux fenêtres. Un objet ? Une personne ? Un vêtement ? Difficile à dire. Juste l’idée qu’il y a une vie endormie derrière cette fenêtre.
Hopper aimait travailler les effets de lumière sur les objets. On retrouve ce type d’approche dans « Nuit dans le parc » (1921) et « Fenêtres nocturnes » (1928)
Edward Hopper – Nuit dans le parc (1921)
Edward Hopper - Fenêtres Nocturnes (1928)
Les deux clients
Même s’il n’y a pas beaucoup d’intimité entre l’homme et la femme, tous les deux semblent proches du fait du vaste espace qui les entoure. Ils sont proches et éloignés à la fois, comme deux étrangers qui ne savent pas communiquer entre eux. Ce sont peut-être les « Oiseaux de Nuit » qui donnent le titre au tableau, des clients insomniaques (maladie du monde moderne) ou des rapaces en quête de proie.
Les deux percolateurs
Ils constituent le pendant inanimé aux deux personnages qui sont assis derrière le zinc. Deux humains comme deux machines. L’éclat vif des percolateurs comme le rouge vif de la robe de la femme. Les percolateurs semblent, par leur taille et leur positionnement, avoir autant d’importance que les personnages.
Salière et poivrier…
C’est avec un réalisme très minutieux qu’Edward Hopper a peint la salière, le poivrier et les serviettes, le sandwich et les tasses. Ce sont peut-être ces éléments qui donnent la vie dans ce bar. Posez vos doigts sur ces petits détails et remarquez comme le débit de boissons devient d’une tristesse absolue, presqu’un musée de cire.
Le troisième client
Il a le dos tourné. Son regard est fixé droit devant, à demi plongé dans l’obscurité. Cet homme passe presqu’inaperçu au premier regard sur le tableau. Et pourtant il est un élément important de l’œuvre, lui donnant une part supplémentaire de mystère, l’impression d’une réalité opaque. On imagine sans vraiment voir.
"Oiseaux de Nuit" - Parodies et détournements
Version Tintin et Milou
Version Star Wars - La Guerre des Etoiles
Version prédateur
Version Play-Mobil
Version fantastique
Version religieuse
Version Espace
Version Star Trek
Version Simpsons
Version Super Héros
Version Animaux
Version requins
Version Fin du Monde
Intégration dans une photo
Version Cinéma - Wim Wenders "The End of violence"
Coloriages
"Oiseaux de nuit" animé
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Là où se trouvait l'atelier d'Edward Hopper à Washington
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